
Bonjour Sarah et bienvenue sur Bunkaland ! Comment vas-tu ?
Bonjour Rachel ! Merci ça va super !
D’après ton profil Linkedin tu es Ă la fois designer mode, accessoires et graphique. Raconte-nous le parcours qui t’a amenĂ© aujourd’hui Ă avoir ta propre marque de maroquinerie ?
Pour commencer j’ai toujours aimé travailler le cuir, j’ai fait une licence de stylisme modélisme à LISAA (Institut Supérieur des Arts Appliqués) et nous n’étions pas du tout formés sur ce matériaux car c’est une matière qui ne pardonne pas l’erreur mais comme j’aimais son tombé, sa résistance et son touché j’ai vite été obsédée et rien ne pouvait m’arrêter ! En plus, je travaillais beaucoup les vestes, pièces structurées que je contre balançais avec des vêtements en soie plus délicats et je m’amusais aussi déjà à créer des accessoires, j’avais fait faire des chaussures et accessoires en cuir. Après mon diplôme, j’ai été contactée pour faire un stage chez Yves Salomon, j’y ai découvert le travail de la fourrure, matière que je ne connaissais pas du tout ! Suite à ça j’ai fait un master en management et marketing du luxe en e-learning, avec des expériences en bureau de presse, boite de production, stylisme photo, community management et pigiste pour un webzine (Open minded), mais je me suis vite rendue compte que je ne pouvais pas abandonner complètement le côté créatif. J’en avais marre de Paris, on m’a suggéré d’aller à Montréal car le Canada a des accords avec la France, je suis donc partie faire un stage chez un jeune créateur, Travis Taddeo, là -bas, le lieu le showroom, le studio/production et son appartement étaient regroupés, l’ambiance de travail était géniale et j’ai pu toucher à tous les aspects du fonctionnement d’une marque, c’était un véritable lieux de vie ! C’est à ce moment-là que j’ai su que je voulais faire la même chose : créer ma marque, sans vraiment avoir d’idée précise. A mon retour j’ai fait des petits boulots, aidé un ami sur son projet de marque SWEN, et commencé à travailler en freelance en tant que styliste accessoires chez Peclers Paris, un bureau de tendance, j’ai commencé par faire les dessins techniques sur Illustrator puis on m’a confié des thèmes et plus de création. J’avais toujours mon projet en tête mais je me disais à l’époque qu’il me fallait un associé car je ne pourrais pas créer un projet toute seule.

Je voulais pouvoir avoir un look chic sans sacrifier mes besoins pratiques.
Sarah Rhouzlane
Comment est-elle née ?
J’adorais créer des accessoires ultra créatifs au bureau mais le problème c’est qu’ils restaient au stade de l’inspiration et j’étais super frustrée de ne jamais les réaliser en vrai ! A l’époque, je bougeais aussi beaucoup et je me trimballais toujours avec des vieux sacs à dos ou des bananes pas forcément très esthétiques, je trouvais les sacs féminins pas du tout pratiques au quotidien voire même gênant mais j’en avais marre de porter des accessoires moches car c’est ce qui termine un look ! Je voulais pouvoir avoir un look chic sans sacrifier mes besoins pratiques. Quand j’ai vu que le festival de Hyères lançait son concours de mode à l’accessoire je me suis dit c’est l’occasion de tenter l’aventure! J’avais déjà réalisé un sac à dos avec des cuirs achetés au Maroc et des pièces de métalleries shoppées chez Première Vision, c’était mon point de départ. Je n’ai pas été sélectionnée dans les 10 finalistes mais j’avais amorcé le processus et j’irais jusqu’au bout toute seule finalement !

Rhouzlane Studio est une marque un peu diffĂ©rente puisqu’elle allie luxe et consommation responsable, ce qui est très rare dans cette industrie. Peux-tu nous expliquer le fonctionnement de la marque et pourquoi avoir fait ce choix?
Nous vivons dans une ère de surconsommation et de surproduction, cela crée énormément de gâchis, j’ai toujours eu du mal avec ça, mêmes les grandes marques se retrouvent avec des surplus de produits et de matières premières qui finissent par être détruites, brulées ou déchiquetées. Ça me fait mal au cœur et en plus, ce sont de vrais trésors, c’est ce qui m’anime aussi : réussir à racheter ces matières pour créer des choses de valeur. Je fais fabriquer mes sacs en France car c’est là que je me trouve. Avec mon façonnier, nous essayons d’optimiser chaque peau avec ces contraintes-là , et donc c’est du cas par cas, avec des associations différentes tout en gardant la même esthétique, donc un vrai travail artisanal. L’essence initiale du Luxe c’est celle-ci pour moi, presque du sur-mesure, de la rareté un objet qui prend du temps, ce n’est pas responsable pour être à la mode mais pour retrouver du sens.
L’essence initiale du Luxe c’est celle-ci pour moi, presque du sur-mesure, de la rareté un objet qui prend du temps, ce n’est pas responsable pour être à la mode mais pour retrouver du sens.
Sarah Rhouzlane
Rhouzlane Studio prĂ´ne Ă©galement une identitĂ© non genrĂ©e et le fait d’accepter la “parfaite imperfection”. En quoi ces valeurs sont importantes pour toi ?
Je pense qu’aujourd’hui plus que jamais, donner un genre à un vêtement ou à un accessoire n’a pas réellement de sens, la frontière est de plus en plus flou, d’autant plus que j’aime mêler les codes du féminin et du masculin, ce qui n’empêche pas d’avoir une identité marquée. Dans notre société de surconsommation, on a des produits qui sont parfaitement identiques et sans charme, l’idée ce n’est pas de se dire que ça va être mal fait mais que la parfaite imperfection c’est justement l’inverse, l’attachement et la valeur se fait par la différence et le geste humain, qui rend chaque sac unique en plus de sa rareté en quantité et du choix de ses matières.
L’attachement et la valeur se fait par la différence et le geste humain, qui rend chaque sac unique en plus de sa rareté en quantité et du choix de ses matières.
Sarah Rhouzlane
Pourquoi est-il aujourd’hui important de repenser notre manière de consommer la mode ?
Au-delà des raisons écologiques évidentes, je pense qu’il faut juste être censé, et un peu plus raisonnable, nous sommes noyés dans le trop et ça nous aide pas du tout à nous trouver nous-même, ce qu’on aime vraiment, ce qui est cool ou utile, même si le charme et la magie de la mode réside dans sa folie et sa démesure, je pense qu’on a franchi des limites ou ce n’est plus stimulant, car c’est devenu boulimique. La mode est une des industries les plus polluante au monde et ça c’est pas du tout glam en réalité, d’ailleurs une nouvelle manière de consommer la mode nous invite à plus de réflexion et donc de créativité.

HonnĂŞtement c’est pas un peu compliquĂ© de lancer sa marque ?
Oui et non, oui parce que ça demande beaucoup d’organisation, de discipline et de rigueur, personne ne nous attend ou nous donne des taches précises à faire, il faut investir dans beaucoup de choses différentes, il faut être multi casquette ça rend un peu schizo parfois mais c’est aussi hyper stimulant !
Et non parce qu’il y a pleins d’outils pour nous aider maintenant, des formations, des podcasts, des groupes d’entrepreneurs, un accès plus facile à des fournisseurs et la démocratisation du DIY et du fait de commencer petit, avec des systèmes de drop et de précommandes, qui permettent de se lancer plus facilement qu’il y a quelques années.
Peu importe ce qui fonctionne ou non, les erreurs, les échecs, rien n’est définitif, on a toujours le pouvoir de rebondir, de réajuster et d’y arriver d’une manière ou d’une autre
Sarah Rhouzlane
Quels conseils aurais- tu aimĂ© que l’on te donne quand tu t’es lancĂ©e ?
On m’a donné des conseils très importants auxquels je me réfère encore aujourd’hui quand je suis un peu perdue mais ce que j’ai compris surtout c’est qu’il faut vraiment croire en soi ! Ça peut paraitre cliché mais c’est vraiment le seul facteur sur lequel on peut avoir un total control, qui fait la différence entre toi et ton voisin. Travaille ton mindset ! Quand on comprend ça, on comprend aussi que peu importe ce qui fonctionne ou non, les erreurs, les échecs, rien n’est définitif, on a toujours le pouvoir de rebondir, de réajuster et d’y arriver d’une manière ou d’une autre, ça permet de rester positif en relativisant.

Que peut-on te souhaiter pour cette nouvelle année ?
De me développer, d’attirer de plus en plus de clients, et j’aimerai faire des partenariats cool avec des artistes !
Retrouvez son travail ici